Repérage des parcelles en retard d'exploitation
L'objectif était de développer une méthode peu coûteuse permettant de localiser des peuplements en retard de gestion dans les petites forêts privées. Ces dernières représentent les principaux réservoirs de disponibilités supplémentaires dans le Grand Est, d'après les études menées par l’IGN. Repérer ces parcelles implique de distinguer les peuplements adultes, très denses et fermés des peuplements gérés, présentant des trouées ou une hauteur dominante moindre.
Acquisition d'images en stéréoscopie
Des images capturées par les satellites Pléïades ont été acquises en stéréoscopie, c'est-à-dire sous deux angles différents, pour afin de reconstituer une image en 3D du couvert forestier. Plusieurs couples ont ainsi été acquis sur l’ensemble du territoire de la Déodatie à l’été 2018 puis à l’été 2019.
Création d'un Modèle Numérique de Hauteurs
Ces images ont été traitées par le Laboratoire ICube-Sertit à l’aide de l’algorithme de stéréovision MGM (More Global Matching) de l’outil s2p, afin de générer une valeur d’altitude pour chaque pixel, et de produire ainsi un modèle numérique de surface sur l’ensemble de la zone.
Ce dernier a été croisé au modèle numérique de terrain issu du survol LiDAR afin d’obtenir un modèle numérique de hauteur qui a ensuite été partitionné en plusieurs classes.
Repérage des trouées
Pour chaque parcelle classée « bois » ou « landes » au cadastre en forêt privée, on a calculé le pourcentage de surface forestière, à l’aide du masque forestier de 2016 produit lors du monitoring régional. Toutes les parcelles dont la surface était occupée par moins de 20% de forêt ont été filtrées et écartées de l’analyse. En croisant le modèle numérique de hauteurs avec les contours des parcelles cadastrales ainsi retenues, on a relevé pour chacune d’entre elles le pourcentage de zones basses et d’ombres, c’est-à-dire de trouées, au sein de cette surface boisée.
On obtenait ainsi un « indice de trouées » calculé comme la proportion de ces zones basses et de ces ombres dans le masque forêt à l’intérieur de la parcelle. Plus l’indice de trouées est élevé, et plus la proportion de trouées au sein de la parcelle est importante.
Classement des parcelles
Sur la base de l’indice de mitage et de la classe de hauteur estimée des peuplements, les parcelles ont été classées en trois catégories : « basses », «gérées ou trop claires », lorsque des trouées y étaient repérées, ou « prioritaires pour la mobilisation ». Ainsi, les parcelles considérées comme prioritaires étaient celles où l’indice de mitage était inférieur à 20 et où les arbres de plus de 15 m occupaient plus de 50% de la surface boisée de la parcelle.
Enfin, les parcelles cadastrales ont été regroupées en îlots d’un seul tenant (parcelles séparées de moins de 20 m) appartenant à un même propriétaire afin de faciliter le travail d’animation et d’évaluer plus facilement l’éligibilité à certains dispositifs d’aides à la plantation.
Des relevés de terrain ont été effectués dans 298 parcelles de forêt privée réparties dans toute la Déodatie lors de l’été 2019. Afin d’échantillonner des parcelles avec différents degrés de suivi sylvicole, les secteurs visités ont été sélectionnés en partant de chantiers récents de coupes d’amélioration connus du CRPF, et en y associant des parcelles voisines sans trace visible de gestion sylvicole récente.
Différentes informations sur les peuplements présents sur ces parcelles ont été relevées : essences présentes, structure, état sanitaire, estimation de l’ancienneté de la dernière coupe, hauteur dominante, surface terrière mesurée au relascope, ouverture du couvert.
Nous avons classé les 362 peuplements rencontrés sur les 298 parcelles cadastrales visitées en trois catégories : « prioritaires pour la mobilisation » ; « basses » ou « présence de trouées » ; cette fois sur la base des observations réalisées sur le terrain. Puis nous avons comparé la classification ainsi obtenue à celle précédemment réalisée à partir de l’indice de mitage et des classes de hauteur Pléïades.
Le résultat montre que 73% des parcelles classées comme étant prioritaires pour la mobilisation d’après les observations de terrain ont été correctement classées comme telles d’après l’analyse d’images satellites. La méthode développée semble donc prometteuse pour guider le travail d’animation des techniciens chargés de l’animation forestière en petite forêt privée.